Un brin d’espoir dans la lutte contre la trypanosomiase humaine africaine ou maladie du sommeil endémique dans 36 pays d’Afrique Subsaharienne, considéré comme mortel sans traitement.
L’initiative Médicaments contre les maladies négligées (DNDi) et ses partenaires ont mené des études qui ont démontré que l’acoziborole est efficace pour traiter la maladie du sommeil qui sévit sur le continent africain. Les études menées entre 2016 et 2019 ont permis d’évaluer la sécurité et l’efficacité de l’acoziborole chez les patients atteints de T.b. gambiense aux stades précoce et avancé. Deux pays étaient visés dans le cadre de la recherche où 208 patients ont été recrutés dans 10 hôpitaux de la RDC et de Guinée. « La THA est une maladie qui sévit sur le littoral Guinéen précisément à Dubréka, Boffa, Forécariah, les patients inclus dans l’étude ont été recrutés dans ces trois zones » a précisé Dre Mariame Camara, investigatrice principale de l’étude au centre de traitement de la THA à Dubreka, en Guinée, et co-autrice de l’article du Lancet.
« En simplifiant le paradigme du traitement, l’acoziborole est une innovation qui pourrait offrir aux systèmes de santé une réponse durable à la maladie du sommeil. Grâce à ces nouvelles données, nous avons l’espoir de pouvoir enfin éliminer une fois pour toutes la maladie, en ouvrant la voie à une approche dite de “dépistage et traitement” au niveau des villages », a expliqué Dr Antoine Tarral, responsable du programme de lutte contre la maladie du sommeil à DNDi et co-auteur de l’article.
Jusque-là difficile d’accès des populations aux soins nécessaires
La lutte contre la maladie du sommeil se heurte souvent à des problèmes liés à la difficulté d’accès aux hôpitaux des patients, même si ces 20 dernières années, le nombre de cas déclarés de la maladie est largement au-dessus des chiffres de 1998, passant de près de 40 000 en 1998 (et une estimation de plus de 300 000 cas, non diagnostiqués) à moins de 1 000 cas en 2020. L’acoziborole va être un accélérateur dans ce processus d’éradication de cette maladie qui touche le plus souvent des populations situées dans des zones très reculées.
« L’acoziborole pourrait avoir un impact majeur sur la prise en charge de la maladie du sommeil »,déclare Dr Wilfried Mutombo Kalonji, chef de projet clinique et responsable médical à DNDi, et co- auteur de l’article publié à la revue médicale de The Lancet.
« Beaucoup de patients atteints de la maladie du sommeil vivent dans des villages isolés dans les mangroves le long de la côte guinéenne. Même si nous disposons aujourd’hui de bonnes options de traitement, nous devons toujours envoyer les personnes dont le test rapide de la maladie du sommeil est positif vers un centre de santé de confirmation », explique Dre Mariame Camara, investigatrice principale de l’étude au centre de traitement de la THA à Dubreka, en Guinée, et co-autrice de l’article du Lancet.
Une maladie mortelle de moins bientôt
Transmise par la piqûre d’une mouche tsé-tsé infectée, la maladie du sommeil (ou trypanosomiase humaine africaine, THA) est mortelle si elle n’est pas traitée. Au stade précoce, les personnes souffrent de maux de tête ou de fièvre. Au stade avancé, le parasite traverse la barrière hémato-encéphalique et envahit le système nerveux central, provoquant des symptômes neuropsychiatriques tels que des troubles du sommeil, la confusion, la léthargie et des convulsions – et pour finir, la mort.
« Nous voici à l’aube d’un potentiel traitement qui peut être administré en une journée et en une dose unique de trois comprimés – cela pourrait être une révolution pour les médecins et les communautés »a affirmé Dr Victor Kande, ancien conseiller spécialisé dans les maladies tropicales négligées au ministère de la Santé de la RDC, investigateur principal de l’essai et auteur principal de l’article du Lancet.
« L’acoziborole pourrait devenir le premier traitement permettant aux médecins de traiter les gens sur place, dès qu’ils reçoivent un test rapide positif dans leur village » a déclare Dre Mariame Camara, investigatrice principale de l’étude au centre de traitement de la THA à Dubreka, en Guinée, et co-autrice de l’article du Lancet.
Une adhésion des autorité sanitaires de Guinée
Les autorités sanitaires soucieuses d’améliorer la santé de la population ont accompagné le site durant toute la durée de l’étude, le protocole a été soumis au comité éthique, au ministère de la santé et à la direction de la pharmacie qui ont donné leur approbation. « Le site a connu des supervisions de la part des autorités sanitaires qui étaient satisfaits du travail et non pas hésité à donner leur accord pour d’autres études à venir » a ajouté Dre Mariame Camara, investigatrice principale de l’étude au centre de traitement de la THA à Dubreka, en Guinée, et co-autrice de l’article du Lancet
Ces résultats positifs de l’étude de phase II/III sonnent comme une lueur d’espoir pour les scientifiques pour soutenir l’objectif de l’OMS d’éliminer la maladie du sommeil chez les humains d’ici 2030. Maintenant il faut bien que l’Organisation Mondiale de la Santé, l’Agence européenne des médicaments (EMA) approuve ce traitement, et le tour est joué. Les semaines et les mois à venir seront décisifs, l’humanité croise les doigts dans l’espoir de voir une réaction favorable de l’OMS et de l’EMA.
Alpha Oumar Bagou BARRY