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Non, la submersion des îles à Boffa n’est pas la conséquence directe de l’urbanisation croissante du littoral

Plusieurs habitants des zones côtières victimes de la montée des eaux, affirment que la construction d’immeubles sur les côtes, notamment à Kaloum, est la cause de ce phénomène qui engloutit leurs terres. Ce même avis est partagé par certains journalistes qui relaient ces informations dans leurs articles traitant de l’érosion côtière laissant place à la mal-information.

Conakry, cette capitale Guinéenne qui émerge dans l’océan atlantique suscite la convoitise des riches. Depuis plusieurs années, son littoral ne cesse d’être agressé par la construction d’infrastructures, notamment des immeubles. Cela nécessite forcément le remblayage de la façade maritime, ce qui repousse d’une manière ou d’une autre la mer. Cet état de fait est assez souvent attribué comme responsable de la montée des eaux, causant des dégâts irréversibles aux communautés insulaires et à ceux qui vivent dans les zones côtières, compromettant leurs moyens de subsistance, en particulier à Kitikata dans la préfecture de Boffa et à Kaback dans la préfecture de Forécariah.

Beaucoup d’entre eux affirment que l’occupation anarchique du littoral, c’est-à-dire le remblayage des côtes à des fins de construction d’immeubles constitue la cause de la disparition de leurs terres entraînée par la montée des eaux. Une affirmation que nous avons souvent entendue en privé de leur part lors de nos visites de terrains lorsqu’ ils tentent d’expliquer l’origine du phénomène de la montée des eaux auquel ils font face.

Cela se lit dans la presse également. Par exemple, dans un article https://guineenews.org/occupation-anarchique-des-bords-de-mers-plusieurs-iles-et-villages-risquent-de-disparaitre-a-boffa/ publié le 07 juillet 2020 par le site d’information guineenews, le chef du port central de Boffa affirme que l’envahissement de leurs îles est provoqué par des constructions anarchiques au bord des mers dans les grandes villes, ainsi que la destruction de la mangrove.

Dans un autre article https://guineenews.org/submersion-erosion-inondation-le-drame-des-habitants-de-lile-kabak/ publié le 24 juillet 2023 par le même site d’information, on peut lire ceci : Lui et tous les autres habitants de la zone pointent leur doigt accusateur sur « l’occupation anarchique de la façade maritime à Conakry » qui, selon eux, les nouvelles constructions en bordures de mer dans la capitale provoquent la pression de la mer sur l’île.

On trouve également ces mêmes affirmations exploitées par des journalistes dans leurs articles sur l’érosion côtière ou l’occupation anarchique du littoral. 

Par exemple, dans un article sur l’occupation anarchique du littoral https://guineematin.com/2020/12/01/occupation-anarchique-du-littoral-lamine-sidibe-accuse-les-chefs-de-quartiers-et-cie/ publié le 1er décembre 2020 par le site d’information Guineematin.com, le rédacteur de cet article conclut ainsi  : A noter qu’en plus de menacer sérieusement les ressources halieutiques de la Guinée, les constructions anarchiques sur le littoral occasionnent aussi souvent des inondations à certains endroits de Conakry et ses environs, notamment à l’île de Kabak, qui est menacée aujourd’hui de disparition. Et, si rien n’est fait pour trouver solution à ce problème, indiquent nos interlocuteurs, les conséquences risquent d’être plus fâcheuses dans les prochaines années.

En parlant de la montée des eaux à Kaback, un autre journaliste du même site, dans un article publié le 23 juillet 2016, conclut ainsi : Il ressort que l’occupation des domaines maritimes par le remblai et la construction d’immeubles, est plus que jamais la menace la plus sérieuse des îles et presqu’îles longeant les 300 km des côtes guinéennes, de Forécariah au Sud, à Boké au Nord en passant par Dubréka et Boffa.

Mais attention : nous avons cherché à interroger les scientifiques pour en savoir davantage sur l’origine de la montée des eaux.

Tous les scientifiques s’accordent sur le fait que la montée des eaux ou élévation du niveau de la mer est une conséquence du phénomène de changement climatique, « notamment la fonte des glaciers et la dilatation thermique des eaux marines. Ces travaux de construction peuvent tout de même aggraver le phénomène », souligne Michael Dieng, doctorant au Centre d’Etude et de Recherche en Environnement.

« Cette montée des eaux peut être causée par deux phénomènes principalement, le phénomène de dilatation des eaux, c’est-à-dire lorsque l’eau prend de la température, elle augmente en volume. On assiste aujourd’hui au phénomène de réchauffement climatique, ce phénomène réchauffe donc les océans qui de ce fait peuvent se dilater. L’autre aspect qui est également vérifié et démontré par les experts, c’est que cette fonte de glacier entraîne tout simplement une remontée de la mer. Cette remontée de la mer se manifeste tout simplement par un phénomène visible, la mer va gagner en espace sur les plages en entraînant parfois des déplacements. Donc c’est un phénomène qui est là, qui se justifie par ce changement climatique », explique Dr Abdoulaye Fall, expert en sauvegarde de l’environnement.

L’augmentation du volume d’eau entraîne des perturbations climatiques selon Pr Kandè Bangoura océanographe. « La perturbation du climat entraîne des modifications des propriétés de l’eau (salinité et température des océans), influençant les mouvements éoliens dans l’atmosphère suite à l’augmentation du volume d’eau. La dynamique se traduit par une intensification des phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les ouragans, les tempêtes. Notons en plus que ce dérèglement climatique se manifeste par une augmentation de l’élévation du niveau des marées habituelles qui submergent les zones côtières basses. Cette situation représente une menace sérieuse pour les populations et les écosystèmes fragiles de cette région » souligne-t-il.

Tout ceci est donc dû à l’activité humaine, car ce sont les émissions de gaz à effet de serre qui sont à l’origine du changement climatique, entraînant également la montée des eaux.

En revanche, Les constructions anarchiques sur le littoral peuvent favoriser tout de même des phénomènes d’inondation lorsque les constructions sont faites sur des zones inondables ou sur les zones d’évacuation des eaux pluviales (lit des cours d’eau ou canaux d’évacuation etc.), sur les bassins de rétention des eaux pluviales comme les marais, et les zones de dépression entre autres. Les constructions ne respectant pas le plan d’urbanisme de la zone favorisent des inondations.

Déjà, l’expression constructions anarchiques dénote le non-respect des plans d’aménagement et par conséquent, elles augmentent les risques d’insécurité dont le cas des inondations.

Verdict :

Bien que l’on puisse penser que la construction et l’occupation des zones maritimes par le biais de remblais constituent les principales causes de la montée des eaux, la science révèle une réalité plus complexe. Scientifiquement, ces aménagements et occupation du littoral ne sont à l’origine de ce phénomène dans des régions côtières telles que Kitikata ou Kaback. La montée des eaux observée résulte avant tout du changement climatique global. Le processus de dilatation thermique naturel des océans, combiné à l’augmentation croissante des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique réchauffant l’atmosphère, est le véritable moteur de l’élévation du niveau des mers impactant nos zones côtières.

Ce reportage est réalisé dans le cadre du Projet Terra Africa piloté par CFI Media.

Ibrahima Sory Bah

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Oumar Bagou

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