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Les brillants résultats au baccalauréat contrastent avec les échecs massifs au concours d’accès à la FSTS. Regards croisés du Pr Touré et Pr Tounkara
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Les brillants résultats au baccalauréat contrastent avec les échecs massifs au concours d’accès à la FSTS. Regards croisés du Pr Touré et Pr Tounkara

La résolution de l’épineux problème de la massification des effectifs au sein de la faculté de médecine, pharmacie et odonto-stomatologie de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry (UGANC), devenue aujourd’hui la Faculté des Sciences et Techniques de la Santé (FSTS), a longtemps été un défi majeur. Pour y remédier, et impulser de manière durable et structurelle la formation des ressources humaines en santé de qualité, une étude diagnostic a été menée en 2017.

Parmi les recommandations de cette étude figurait en bonne place la régulation de l’admission aux études médicales par un concours strictement encadré par des principes de transparence et d’équité. Ce concours réservé exclusivement aux lauréats du baccalauréat avec mention dans les séries sciences expérimentales et mathématiques ambitionne de recruter les plus brillants élèves de la République. La mise en œuvre de cette stratégie entamée depuis 2018 se heurte à une difficulté majeure, celle de la discordance entre les résultats du baccalauréat et ceux du concours à la FSTS. Ce décalage se pose avec acuité suite aux résultats du dernier concours de recrutement soulevant ainsi des interrogations, des réflexions et des pistes de solution. A travers ces quelques lignes nous nous interrogeons.

En effet, les élèves ayant brillamment réussi leur baccalauréat cette année, et sélectionnés pour le concours sur la base de leur mention, ont échoué massivement. Sur plus de 600 candidats, seuls 24 ont été admis, soit un taux d’échec de plus de 95 %. Il faut espérer que les résultats issus des autres concours tel que l’accès aux classes préparatoires pour les grandes écoles soient meilleurs.

Cet échec massif représente la partie visible d’un iceberg dont les contours et les dimensions doivent rapidement être cernés par les trois départements en charge de l’éducation, mais aussi les enseignants et les parents d’élèves. En effet nos champions ne semblent pas être des champions. Sinon comment expliquer une telle discordance entre deux évaluations censées évaluer les mêmes élèves avec des épreuves tirées exclusivement de leur programme d’enseignement du lycée, corrigées par leurs enseignants ?

Les bacheliers ayant obtenu une mention sont supposés avoir une maîtrise solide des matières enseignées au lycée. Leur succès au baccalauréat, considéré comme un indicateur clé de leur préparation académique, devrait logiquement leur permettre de réussir un concours basé sur le même programme et organisé seulement quelques semaines après la publication des résultats du Bac. Cependant, les résultats de ce concours racontent une toute autre histoire. Ils soulèvent des interrogations profondes sur la qualité du système éducatif guinéen. Si les sujets du concours sont bien alignés sur le programme du lycée, pourquoi ces élèves, qui ont brillé au Bac, échouent-ils de manière si généralisée à ce concours ? Cela pourrait indiquer que les méthodes d’enseignement et d’évaluation au lycée ne préparent pas efficacement les étudiants aux examens plus compétitifs. D’autres facteurs, tels que la transition entre le secondaire et l’enseignement supérieur, pourraient également jouer un rôle perturbateur.

S’il est indéniable que le taux d’alphabétisation des enfants a progressivement augmenté au fil des décennies dans notre pays, force est de constater que cette augmentation semble avoir été accompagnée d’une détérioration de la qualité de l’enseignement. Depuis les politiques d’ajustement structurel proposées par la Banque mondiale au début des années 1980, l’État guinéen, à l’instar de nombreux autres pays africains, a réduit ses investissements dans l’éducation, alors que le nombre d’enfants en âge d’aller à l’école ne cesse de croître. Le résultat est une insuffisance criante d’infrastructures scolaires. Par exemple, entre Kipé et Sonfonia, le nombre de collèges et de lycées publics est dramatiquement bas, il est de même pour les grandes villes de la Guinée. Ce manque est partiellement comblé par le secteur privé, mais cela ne fait qu’accentuer les inégalités.

A titre d’exemple, les facultés des sciences médicales du secteur privé ne suivent pas les mêmes critères de recrutement des étudiants, bien que cela ait été harmonisé par la décision N°2019/073/MESRS/CAB du 22 août 2018. Cela a conduit à une explosion des effectifs dans ces établissements, contrastant fortement avec la régulation stricte mise en place par le département en charge de l’enseignement supérieur à la Faculté des Sciences et Techniques de Santé de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry. La rigueur dans l’accès aux études médicales devrait être élargie aux universités privées pour garantir durablement la qualité des ressources humaines en santé.

Un autre aspect préoccupant est la qualité des ressources humaines dans l’éducation. Autrefois, les enseignants du primaire et du secondaire étaient reconnus pour leur pédagogie et leur maîtrise des programmes. Aujourd’hui, la réalité est bien différente. L’évaluation régulière des enseignants, autrefois assurée par des inspecteurs de l’éducation visitant les salles de classe de manière inopinée, a presque disparue. L’école qui symbolisait la discipline et la rigueur n’existe plus et cela depuis des décennies.

Le système éducatif est désormais largement dominé par le secteur privé, alors qu’il devrait être un domaine régalien de l’État. Actuellement, il n’existe qu’un mécanisme minimaliste d’habilitation des enseignants et des établissements scolaires. En attendant une réforme en profondeur de notre système éducatif, des organismes indépendants comme l’Autorité Nationale d’Assurance Qualité (ANAQ) devraient être sollicités par le MEPUA pour mettre en place des processus d’assurance qualité dans les établissements scolaires. Suite aux anomalies et difficultés récurrentes, il serait préférable de dédier l’organisation du Bac à une structure autonome et indépendante, sous tutelle technique des ministères en charge de l’éducation et de la formation… Certains pays comme le Benin et le Sénégal ont un office national du Baccalauréat. On pourrait s’en inspirer.

En attendant ces réformes, une analyse approfondie associant le MEPUA et le Ministère de l’Enseignement supérieur est indispensable pour identifier les causes sous-jacentes de cette discordance. Il pourrait également être nécessaire d’accompagner davantage les élèves dans leur préparation aux concours, en renforçant les compétences analytiques, la résolution de problèmes, et la capacité à appliquer les connaissances dans des contextes variés.

En tout état de cause, des reformes pour renforcer la qualité de l’enseignement et la sécurisation des résultats des examens s’imposent à tous. Cela permettra de garantir l’équité et la justice dans l’accès aux études supérieures, mais aussi pour s’assurer que les élèves guinéens soient véritablement prêts à relever les défis académiques et professionnels qui les attendent. Seule une approche sérieuse et structurée permettra de restaurer la confiance dans notre système éducatif et d’assurer un avenir prometteur pour nos jeunes.

Le contenu de cette tribune n’engage pas notre rédaction, elle a été proposée par le Pr Abdoulaye TOURE, Professeur des universités et le Pr Thierno Mamadou Tounkara, Professeur des universités.

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Oumar Bagou

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