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Boues rouges et balle de riz, ces déchets qui peuvent remplacer le ciment

Des déchets miniers et agricoles, bien combinés, sont utilisables pour la construction en Guinée.

En Guinée, comme dans plusieurs pays miniers, la boue rouge est le principal déchet de l’extraction de l’alumine à partir de la bauxite. C’est aujourd’hui une source de pollution. Elle pourrait toutefois devenir une matière première : des chimistes de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry viennent en effet de montrer qu’en la mélangeant avec un autre déchet, d’origine agricole, on peut fabriquer un matériau susceptible de remplacer le ciment.

La bauxite, richesse de la Guinée

La Guinée possède les plus grands gisements de bauxite au monde (environ un tiers des réserves mondiales) et en est le deuxième producteur après l’Australie. La bauxite représente 90% des activités minières du pays, qui elles-mêmes concourent à 90% des exportations. La Guinée possède également la seule raffinerie d’Afrique de l’Ouest qui convertit la bauxite en alumine, qui est ensuite exportée pour être transformée en métal.

La boue rouge est un sous produit de l’extraction de l’alumine de la bauxite, le minerai d’aluminium, à l’aide de soude. « Elle contient une quantité considérable d’alumine, de soude caustique, d’oxyde ferrique à l’origine de sa couleur rouge, et d’oxyde de titane », explique Sékou Traoré, directeur du Service des études avancées et de la recherche universitaire.

Stérilisation des terres

« À l’heure actuelle, environ 150 millions de tonnes de boues rouges sont rejetées dans l’environnement chaque année dans le monde entier » précise S. Traoré. L’épandage de cette boue est un énorme problème environnemental en raison de la concentration des métaux, et même d’éléments radioactifs. Les importantes surfaces de terres ainsi recouvertes deviennent incultivables. En outre, par infiltration, une partie des constituants toxiques se retrouvent dans les eaux souterraines, utilisées pour l’irrigation et pour les besoins des populations.

Si des solutions ne sont pas trouvées, les terres agricoles de plusieurs zones minières pourraient ainsi devenir entièrement stériles. C’est pourquoi de nouvelles technologies utilisant la boue rouge comme matière première pour la fabrication de produits à haute valeur ont été expérimentées à l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry par S. Traoré et plusieurs de ses collègues.

Des polymères minéraux

Pour ce faire, ils se sont appuyés sur les connaissances en synthèse de géopolymères, technologie émergente pour l’utilisation de sous-produits industriels. Les géopolymères, formés par une réaction chimique entre de la silice et de l’alumine, ont des utilisations potentielles très variées : matériaux ignifuges, artefacts en pierre décoratifs, isolation thermique, matériaux de construction de faible technologie, carreaux céramiques à faible énergie, réfractaires, etc.

Pour valoriser la boue rouge, les chercheurs guinéens avaient besoin d’une source de silice. Ils ont eu l’idée d’utiliser la cosse de riz, autre matière première abondante en Guinée. La production actuelle de riz s’élève en effet à 2,35 millions de tonnes de riz par an, selon l’Agence nationale des statistiques agricoles.

La cosse de riz, source de silice

Pendant la mouture du riz local à l’état naturel (paddy), environ 22% du poids du paddy sont transformés en balle de riz (et 78% pour les grains). La balle de riz contient environ 75% de matières volatiles organiques et le reste, soit 25%, est converti en cendres pendant le processus de cuisson. Ainsi, une tonne de paddy fournit 220 kilogrammes de cosses, qui deviennent 55 kilogrammes de cendre.

La composition chimique exacte de ces cendres varie selon la provenance du riz, et le climat. Mais elles sont riches en silice. Le processus chimique de fabrication du géopolymère est une activation alcaline de la boue rouge en tant que principale source d’alumine réactive et de cendre de balle de riz en tant que principale source de silice réactive.

Des briques moins coûteuses que le ciment

Pour les besoins de la démonstration, des balles de riz brutes ont été apportées au Laboratoire de recherche sur les matériaux de l’Institut polytechnique de l’université depuis une usine de riz locale à Sinko, dans la préfecture de Beyla, au sud de la Guinée. Elles ont été brûlées à 700°C pendant une heure, puis les cendres ont été broyée pendant 30 minutes et tamisées à travers des mailles de 90 micromètres pour obtenir une poudre.

« Les briques et les carreaux fabriqués dans les essais ont une durée de vie équivalente à ceux qui sont fabriqués avec du ciment», affirme Sékou Traoré, directeur du Service des études avancées et de la recherche universitaire.

L’une des caractéristiques propre aux briques produites à travers la boue rouge c’est leur capacité de garder leur couleur originale. C’est à dire même après plusieurs années, sous le soleil et la pluie elles restent intactes. A cela il faut ajouter, que ces briques sont moins coûteuses que celles en ciment.

Un seul bémol, selon Siné Diakité directeur général de l’Institut supérieur d’architecture et d’urbanisme : si la Guinée commençait à produire ce type de brique, la totalité des boues rouges disponibles ne suffiraient pas à remplacer tout le ciment. Mais faut-il vraiment s’en plaindre ?

Non ! Parce qu’en réalité si toutes les boues rouges des différentes zones minières sont recyclées, cela permettra de débarrasser d’énormes superficies cultivables, de déchets polluants. Déchets qui rendent des terres stériles.

 

Alpha Oumar Bagou BARRY

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